Stèles discoïdales

Après la Réforme, les Barnabites reprennent en main la commanderie d’Aubertin. Sur l’emplacement du cloître médiéval détruit, ils installent un cimetière qui fait suite à celui des origines, très vraisemblablement situé au nord de l’église1. Abandonné dans les années 1865-1870, suite à la création des actuels cimetières de Lacommande et d’Aubertin, cet espace adjacent à l’église et à l’hôpital est aménagé vers 1990 en ce qui est appelé un « cimetière-jardin », dans le cadre de la rénovation du site, pour mettre en valeur une collection, unique en Béarn, d’une cinquantaine de stèles discoïdales, inscrites aux Monuments Historiques (Fig. 1).


Fig. 1 - Le cimetière aux stèles discoïdales. Sous le toit du promenoir, de construction récente, des corbeaux anciens ont été conservés. Ils sont les vestiges de constructions qui s’appuyaient sur le mur est de l’hôpital et sur une partie du mur sud de l’église.

De semblables stèles discoïdales ont été utilisées comme monuments funéraires en Europe avant même la christianisation2. Il en subsiste un grand nombre au Portugal et de part et d’autre des Pyrénées, principalement au Pays basque. Leur signification reste incertaine. Parmi les hypothèses avancées, une des plus récentes consiste à évoquer un monument « solaire » où le disque symboliserait le ciel et l’incommensurable, et le pied, carré ou trapézoïdal, fiché en terre, représenterait notre monde terrestre3.

La Fig. 2 révèle que les stèles étaient effectivement toutes orientées face au soleil levant dans leur disposition d’origine. Elles étaient placées à la tête du mort dont les pieds étaient dirigés vers l’est. Cette orientation, naturellement adoptée par la Chrétienté dans le cadre de la Résurrection des morts4, a été perdue après l’agencement en cimetière-jardin. De plus, les faces les plus intéressantes, placées au bord des allées pour être mieux visibles, sont désormais dissimulées dans la haie de buis.


Fig. 2 - Photographie du cimetière de Lacommande avant rénovation, prise par l’association Lauburu en 1979.
Les stèles et croix sont toutes parallèles au mur oriental de l’hôpital.

Contrairement à ce que l’on peut encore lire ici ou là, ces stèles ne sont ni « basques », ni « cathares », encore moins utilisées pour des tombes de pèlerins. Il s’agit tout simplement du cimetière utilisé, dans la période 1600-1850, par une communauté paroissiale d’environ 1500 personnes5. Les registres font état d’une moyenne de 30 décès par an dans cette période. Même si environ 1/3 des inhumations ont été effectuées dans l’église jusqu’en 1776, ce sont au moins 6000 paroissiens qui reposent dans ce cimetière-jardin ! Lors de la rénovation de ce cimetière, le nettoyage de la surface fut rapidement abandonné par suite de l’affleurement d’ossements. Il est probable que le sous-sol contient aussi d’autres stèles discoïdales.

Ce cimetière contient aussi six stèles cruciformes, deux stèles en forme de borne et un sarcophage. Ce dernier, découvert en 1987 près du mur de la sacristie semble dater de la fin de l’Antiquité. Il pourrait indiquer l’existence d’une nécropole aux Ve-VIe siècles, bien antérieure à la construction de l’hôpital, mais en l’absence d’autre mobilier de ce genre, le débat reste ouvert.

Tous ces monuments funéraires ont été récemment inventoriés car ils subissent malheureusement une dégradation rapide (Fig. 3)6.


1979, photo Lauburu

2016
Fig. 3 - Evolution d’une stèle de 1640, la plus ancienne de la collection..